L'immeuble de la rue Oberkampf(2)
Troisième étage (porte droite) Mme Dubec
Il pleut sur Paris ce matin, une pluie qui vous prend de face et vous cingle le visage, portée par le vent d'ouest. Mme Dubec courbe le dos et avance à petits pas. Comme tous les mardis matin, elle se rend à l'office de 9 h, à l'église Saint Ambroise. Elle aime bien cette église, elle y a ses habitudes et pour rien au monde ne dérogerait à ce rituel qui lui paraît comme essentiel car Mme Dubec éprouve un amour immodéré pour Jésus, cet être si beau avec sa barbe blonde.
C'est le seul homme de sa vie, celui qu'elle vénère et en qui elle croit le plus. Alors elle entre dans l'église et va s'installer toujours à la même place, au premier rang, face l’autel. Il y a peu de monde....
Il faut dire que l'église n'attire plus guère les foules. Au moins ceux qui sont là sont de bons chrétiens. Toujours les mêmes...Beaucoup de femmes et des femmes âgées. Juste à côté d’elle, il y a Mme Badin. Ah Mme Badin !! elle ne l'aime pas. D'ailleurs elle ne lui dit jamais bonjour. Avec ses minauderies elle essaie d'attirer l'attention du jeune curé de la paroisse, un beau jeune homme élégant, arrivé depuis peu....Le curé non plus elle ne l'aime pas. Il ne la regarde jamais, ne lui a jamais parlé.
Il faut dire que Mme Dubec passe inaperçue car tout est grisaille chez elle : ses vêtements, sa vie. Pas d'amies, une vie monotone. Seul Jésus lui apporte un peu de joie de vivre car elle a la foi, une grande foi, une foi inébranlable qui l'a bien aidée à traverser l'existence. Alors elle récite des prières, des "Notre Père" en veux-tu en voilà, des "Salut Marie" jusqu'à saturation. Elle manque d'amour.
Mme Dubec ferme les yeux, se met à genoux et entre en prière.....L'orgue égrène ses notes et Monsieur le curé entonne le Notre Père. Une heure à prier, loin du monde.......
Daniel