Quand ma bougie vacillera
A la suite de mon texte"Lettre à ma vie", j'ai eu le plaisir de recevoir ce beau et émouvant message de mon amie Célestine que je diffuse ci-dessous. Je profite de l'occasion pour donner l'adresse de son blog qui est l'un des plus intéressants que je connaisse. Tout y est: l'écriture, le style, l'originalité, les sujets. Vite allez le visiter !! (http://celestinetroussecotte.blogspot.fr)
Le printemps de Claude Théberge
Au dernier jour de mes derniers jours.
Quand ma bougie vacillera comme dans les contes symboliques.
Quand mon corps presque raidi, sera devenu camisole, avachi par la décrépitude et par un quotidien trop lourd.
Quand mes yeux qui ont tant pleuré et tant contemplé, lutteront sans force pour rester ouverts.
Quand mes membres craquants comme des brindilles ne me porteront plus.
Quand de ma peau chiffonnée le sang se retirera.
Alors seulement je te dirai. Alors seulement tu sauras.
Dans mon cerveau s’ouvrira une petite fenêtre de projection.
Sur l'écran du souvenir défilera le plus beau film qui fût. Un film en cinémascope. Un truc à rendre zinzin Hollywood et Cinecitta. Un condensé d’extravagances et de douces joies.
Le biopic d’une bergère naïve qui se croyait princesse, amoureuse de rêveurs qui l’emmèneraient en escapade, comme on se prend le coeur dans un tapis volant, sur le bleu velours sombre d’une nuit de Chine…
Je te dirai mes abandons sensuels, telle une tige un bambou ondulant au fil du vent qui passe, au fil des mains qui pansent.
Je te dirai en riant mes erreurs idiotes d’apprentie artiste, mon univers un peu lunaire.
Ma fuite de ce monde aliéniste, outrageux, incompréhensible, dont la violence scarifia mon cœur par endroits comme des épingles rouillées.
Mes espoirs de jardinière cultivant sans relâche des graines d'enfants.
Et ma maîtrise bien maladroite des déferlements d’émotions, de désir, de révoltes qui agitèrent mon âme et mon corps de tremblements.
Jusqu’à parfois se demander si la psychose, ou un grain de folie, ne me grignotaient pas sournoisement la cervelle de leurs dents de sabre. Comme des tigres furieux.
Tu sauras alors ma recherche obsédante du bonheur.
Dans chaque note de jazz, chaque étoile, chaque regard ami.
Comme tout le monde ici-bas. Pour oublier le malheur d’être simplement un homme ou une femme ordinaires, sur cette planète échouée sans conséquence...Un être humain aux poings serrés, impuissant. Absurde point de suspension précipité dans un bain d'acide.
Et puis, enfin, au milieu de mon chemin, j'ai trouvé le bonheur : il se cachait au fond de moi, tout simplement.
Et désormais, je sais que, au dernier souffle exhalé de ma bouche, que tu abreuvas de tant de baisers et de mots fous... je te dirai, la Vie, combien je t’ai aimée.