Madame la marquise
L’été, lorsque le temps était clément, nous descendions chaque matin la grande allée du château. Devant nos yeux l’eau du canal scintillait sous les rayons du soleil. Nous tournions sur notre gauche pour nous enfoncer dans les bosquets. Nous aimions particulièrement le bosquet du Roi avec sa grande pelouse et ses arbres centenaires.
Elle marchait gracieuse pendant que je tenais l’ombrelle qui protégeait sa peau blanche et poudrée. Mme la Marquise aimait ces instants de calme, loin des mesquineries de la cour, de toutes ces intrigues qui n’avaient pour but que de se valoriser devant le roi. Un monde cruel, sans pitié. J’étais un de ses jeunes valets, sans doute le préféré……….
Moi aussi j’appréciais ces instants de douceur où nous nous retrouvions tous les deux. Les oiseaux chantaient et quelques petits nuages filaient dans le ciel. Un vieux chêne nous attendait. Je posais le petit panier dans lequel j’avais préparé un encas et nous nous asseyons pour goûter la paix des lieux.
Mme la Marquise poussait alors un léger soupire qui en disait long sur cette vie apparemment facile mais ô combien compliquée. Sa main se posait sur la mienne comme si elle voulait me demander de l’aide, oiseau fragile dans un monde impitoyable………..
J’essayais toujours de la protéger en lui délivrant des informations utiles. Une grande complicité s’était installée entre nous malgré la différence sociale. Nous restions ainsi pendant deux heures au moins. Le temps s’arrêtait pour nous, suspendu à cet instant si agréable.
Presque toujours je l’invitais discrètement à venir avec moi derrière le petit taillis. Madame la Marquise s’abandonnait alors à mes mains indiscrètes. Parfois elle poussait de petits cris. J’aimais beaucoup !!