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Les voies de l'âme
7 juin 2011

Comme dans un ascenseur

 

Extrait de l’entretien de l’actrice Vahina Giocante paru dans la revue de l’INREES. Je publie ce texte pour deux raisons : d’abord le sujet, en lui-même, devrait vous intéresser et attiser votre curiosité, et puis il est l’exemple que la loi du silence commence à se craqueler autour d’un sujet longtemps resté tabou mais qui a concerné beaucoup plus de personnes qu’on ne le pense. Il n’y a pas que notre monde « celui des vivants », il y aussi un autre monde invisible mais pourtant réel dans lequel nous sommes tous amenés un jour à nous rendre. La mort n’est qu’un passage d’un monde à l’autre.

 

vahina_giocante_637x0_1J’ai vécu une EMI à l’âge de 17 ans. J’ai passé plusieurs heures dans le coma. J’avais dû attraper un virus en voyage. J’ai grandi en Afrique du sud et au Benin. J’ai un long parcours avec l’Afrique, j’y ai fait mes premiers pas. C’est le berceau du monde à mes yeux. Il y a des énergies très dures et violentes là -bas. Donc à cette époque, je revenais du Kenya. J’étais chez moi, en train de me déshydrater complètement. Je n’avais plus de salive, c’était foudroyant. D’ordinaire, je ne suis pas trop médecins, médicaments. Je ne me soigne qu’avec la médecine traditionnelle, aussi j’ai attendu le dernier moment pour appeler à l’aide. J’ai appelé le SAMU alors que j’étais seule chez moi, je commençais à me sentir très mal, je n’avais plus de sensation, plus d’eau. Je vomissais, je me vidais. J’avais la sensation d’avoir 95 ans : mes os étaient rétractés, j’étais dans une position fœtale, je sentais mes os, ma peau qui se flétrissaient. Comme des fleurs qui tombent quand elles n’ont plus d’eau. Je n’avais plus de liquide lacrymal dans les yeux, j’avais mal, je sentais que je n’étais plus du tout irriguée, ma bouche était pâteuse. Vraiment, j’étais comme une vieille mamie ! Puis j’ai perdu connaissance chez moi, avant que les secours n’arrivent, j’avais perdu conscience. Je me suis retrouvée dans une sorte d’ascenseur, pas un tunnel mais un ascenseur. Au début, j’étais dans des mondes très bas, obscurs, sombres, vraiment désagréables, et des questions me venaient. « As-tu été suffisamment bonne ou mauvaise avec telle personne ? Quand tu as vécu telle chose, as-tu eu la réponse appropriée ? » Il y avait des questions sur des moments marquants de ma vie, des questions sur des gens… Ma réponse à chaque fois était : « Peu importe que j’ai été bonne ou mauvaise », puis je montais d’un étage, progressivement, en fonction des étapes dans ma vie. C’était comme un bilan des évènements de ma vie. La chose très intéressante était que je ressentais émotionnellement ce que la personne en face de moi vivait. Mettons, par exemple, que si j’avais à l’esprit une scène de dispute, je ressentais mon point de vue et celui de mon interlocuteur. Je me trouvais dans une forme d’empathie extrême. Plus je m’élevais, plus le brouillard se dissipait, plus la clarté était intense et lumineuse. Puis je suis arrivée dans une sorte de non-espace, ou d’espace avec une lumière qu’on ne peut pas voir ici, qu’on ne peut pas connaître. C’était juste d’une clarté, d’un blanc… et des êtres étaient là. Une sensation d’amour indicible ; je crois qu’à ma connaissance personne ne m’a jamais aimée comme ça. Une avalanche de ce sentiment d’amour, plus qu’un sentiment d’ailleurs, c’était même presque trop violent ! Je me suis mise à pleurer, mais c’était extatique. Plus aucune dualité : plus de peurs, ni de froid, ni de faim, ni de soif, rien, plus de matériel. Aucune émotion négative de colère, aucune tristesse ni nostalgie. Rien! Que de l’extase, une gigantesque gratitude, immense ! Et je me demandais : « Qu’est ce que je vais pouvoir faire de tout cet amour là »? C’était trop.

Est-ce que vous perceviez votre corps à ce moment là ?

Non, plus du tout, aucune densité. Je n’avais pas conscience de mon apparence, je sais juste que les êtres autour de moi avaient une apparence éthérée, quelque chose un peu comme des ondes, de la lumière. Pas du tout matérialisées, leurs formes étaient fluides, changeantes.

Vous aviez des sensations physiques, une fois dans l’ascenseur ?

Plus rien ! Si, en fait au début, j’avais des sensations d’inframonde, des choses très obscures et noires, mais en même temps mon corps n’était pas en souffrance. C’était le mental qui souffrait. Je ne me suis pas demandé ce que je faisais là, je n’ai pas eu peur, ni ressenti l’étrangeté de la situation, je ne me suis pas imaginé que j’étais morte, pas du tout ! Une fois dans cet espace très lumineux, je me suis dite : « C’est top ! Je veux rester ici quoi qu’il arrive ! » J’avais la sensation que toutes ces entités étaient familières ; amis, famille, j’éprouvais de la joie à les retrouver : « Je suis chez moi, je suis avec ma famille ». Puis à ce moment on m’a dit : « tu n’es pas au bout du voyage. Tu vas réintégrer ton corps ». Alors c’est ça qui a été douloureux. Quand je réintègre mon corps. Non seulement je ne suis plus chez moi, mais dans la voiture des pompiers, sous perfusion, avec un masque à oxygène sur le visage, et c’est très violent. Bruits, agitation, des odeurs, ça fait mal. C’est excessivement flippant, je panique. Je leur dis : « tout va bien, ramenez moi chez moi ». A l’hôpital on m’a réhydratée, fait des analyses en long, en large et en travers… mais on ne m’a pas posé de questions sur mon expérience. Je n’en ai pas parlé en réalité. Pourtant je m’en souvenais à la perfection, je savais tout ce qui s’était passé et dans les jours qui ont suivi, pendant des mois même, dès que je m’endormais, je retournais dans cet espace. Mon corps était comme un vêtement trop serré, trop étriqué, inconfortable ! Encore aujourd’hui, le souvenir de cette expérience reste parfaitement clair ! C’est arrivé il y a dix ans.

Avez-vous pu en parler dans les semaines qui ont suivi ?

Non. Car l’expérience a été tellement forte que je n’avais pas vraiment de mots. Surtout au moment où l’on vient de la vivre, c’est très compliqué d’essayer d’analyser, de formuler ce que l’on a ressenti, de parvenir à se faire comprendre. Mais une chose est sûre : quand je suis revenue, j’étais complètement différente. Déjà, la mort ne m’inquiétait plus. J’avais acquis une sérénité à toute épreuve, un peu déconnectée de mes émotions : je ne ressentais plus de colère, tout me paraissait superflu.

Vous aviez peur de la mort avant ?

Non, mais j’avais peur du vide de l’univers. Je me sentais très petite dans l’univers, j’éprouvais une sorte de malaise… Au contraire, maintenant l’univers me paraît beaucoup plus étriqué. J’ai eu cette sensation de vivre non pas une naissance, mais l’inverse : d’être née ailleurs. Quand on accouche ici, on est joyeux ! On va à la maternité, c’est génial, c’est extraordinaire. Qui nous dit que cet enfant ne vient pas d’ailleurs ? Qui nous dit que l’esprit de cet enfant ne s’est pas extirpé, ne vient pas d’un espace, d’un autre endroit pour venir ici ? Il y avait une célébration quand je suis arrivée « là-bas ». Les mots me manquent ! Là-bas, ailleurs. C’était comme une naissance temporaire, j’ai fait machine arrière. Comme une fausse couche quoi (rires) !

 

Ci-dessus: Portait de l'actrice Vahina Giocante

Commentaires
B
Merci pour ce merveilleux témoignage qui me réconforte infiniment car je viens de perdre ma mère la semaine derniere.<br /> <br /> J' espère un jour pouvoir la retrouver car elle m' a tellement donné d' amour...<br /> <br /> Beutou
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D
Je crois aux EMI( ou NDE). Beaucoup de personnes en ont vécu, plus qu'on ne le pense. Je crois en l'existence d'un autre plan après la mort. Certains m'ont parlé de leurs expériences et c'était criant de vérité. Ils en parlaient avec beaucoup d'émotions et tous m'ont dit être transformés par ce qui leur était arrivé. Ils ne pouvaient plus vivre comme avant.
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K
Pas grand chose à ajouter à part dire que je ne fatigue jamais de lire ce genre de témoignage. Ça me fascine.
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