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Les voies de l'âme
16 mars 2013

Sombreros et mantilles

Sombreros et Mantilles

ketty_rina_02Sur son blog(http://sur.le.chemin.over-blog.com/), Maylie parle d’un souvenir d’enfance où elle évoque une chanteuse populaire qui fut célèbre après la guerre, Rina Ketty. Cela a remué en moi quelques souvenirs.

J’avais 10 ans et, chaque année, je partais en vacances avec mes parents dans le Limousin près de Limoges, là où habitait ma grand-mère. Je m’y ennuyais ferme car j’étais un enfant plongé dans un monde d’adultes et ce monde ne m’intéressait pas. Difficile pour moi d’avoir des copains avec qui jouer car, ce n’était pas en venant une fois par an, au mois d’août, que je risquais de me faire des amis. Mes seules distractions consistaient à aller chercher le lait tous les soirs à la ferme. Nous partions tous les deux, ma grand-mère et moi. Je lui donnais la main et dans l’autre je tenais le pot de lait. Arrivés à la ferme on entrait dans l’étable où la fermière allait traire une vache qui nous donnait un breuvage bien mousseux et tout chaud. Parfois avec ce lait ma grand-mère faisait du beurre. Elle s’installait confortablement sur une chaise, un bol entre les jambes et battait vigoureusement le lait pendant un temps assez long. Et miracle ! Celui-ci  se transformait progressivement en beurre, un bon beurre qu’on étalait le matin sur nos tartines. J’aimais cet instant. Une odeur de café flottait dans la cuisine et le pain de campagne, livré par le boulanger dans son camion, était encore tout chaud  et croustillant.

Autre distraction : le lavoir. Une fois par semaine ma grand-mère m’emmenait au lavoir. Elle posait le linge sale dans une brouette et nous traversions,  tous les deux, le village pour nous rendre à ce vieux lavoir. Elle y  retrouvait d’autres femmes car c’était un lieu d’échanges où tous les secrets du village étaient connus. Je me rappelle toutes ces femmes, vêtues de noir, les mains rosies par le froid de l’eau, brassant leur linge avec détermination.

Saint-Priest-Taurion151La vie était  rude et les commodités encore sommaires. Ma grand-mère prenait son baquet en bois qui lui permettait de se mettre à genoux au bord de l’eau. Puis elle posait son linge à côté d’elle. Elle avait un grand battoir et tapait, tapait fort sur son linge. C’était très physique surtout lorsqu’il s’agissait de laver des draps et de les essorer ensuite. Pour l’essorage il fallait être au moins deux à tourner le drap. J’étais fasciné par l’eau toute bleue qui s’écoulait du lavoir, la couleur étant due au produit utilisé. Laver du linge, prenait du temps car il fallait repartir avec la brouette, rentrer à la maison et l’étendre sur le fil. La machine à laver et l’essoreuse n’existaient pas encore. Mais quel bonheur de se coucher dans des draps si propres et si bien aérés.

En dehors de ces activités, pas grand chose à faire. Heureusement il y avait dans la grande maison, un vieux gramophone et plein de disques. Alors je m’installais dans le jardin. J’aimais bien ce gramophone. Son haut parleur avait la forme d’une fleur et il fallait le remonter à la fin de chaque morceau. A cette époque, écouter un disque se méritait vraiment ! Il fallait aussi parfois changer l’aiguille qui s’usait à force de tourner. Mes disques préférés étaient ceux de Rina Ketty » Sombreros et mantilles » et «  J’attendrais », les gros succès de l’époque. Je les connaissais par cœur et les ai écoutés un nombre incalculable de fois.

Le temps s’écoulait ainsi dans la chaleur du mois d’août, mon chien me manquait beaucoup. Cette grande maison me faisait peur, surtout la nuit. J’avais l’impression que des fantômes traversaient les pièces. J’enfouissais ma tête sous les draps, tremblant de peur. Les arbres commençaient à jaunir et fin août, il n’était pas rare de trouver des champignons, de gros et vigoureux ceps que l’on s’empressait de déguster dans une omelette bien baveuse. J’avais hâte de rentrer chez moi, de retrouver ma maison et mes habitudes.

Souvenirs….Souvenirs….

PS: Sur google, j'ai retrouvé une photo du lavoir. Il n'a pas changé !

Daniel

Informations

Si vous  êtes disponibles le 20 mars à 14h30, vous pouvez venir nous retrouver dans un café parisien. Nous sommes quelques amis bloggeurs à nous rencontrer de temps en temps. Cela nous ferait grand plaisir si vous acceptiez de vous joindre à nous. Un bon moment pour parler à bâtons rompus et échanger des nouvelles.

Le lieu de rendez vous  se situe dans un café parisien juste à côté  de Notre Dame et de l’Hôtel Dieu ( je ne connais pas son nom !).

Voici mon numéro de téléphone : 06 07 05 65 18.

Commentaires
P
Mais comment qu'elle le sait notre Eve Lyne que j'ai repassé mes chemises au milieu de ce dimanche après-midi ?
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E
Dis donc PLV mon ami...<br /> <br /> Tu sais que j'ai bien hâte de voir la photo de vous trois sur le Parvis de Notre Dame.<br /> <br /> Comme il devrait faire beau...<br /> <br /> Repasse donc ta chemise rose :)
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P
Oui, c'est bien beau tout ce que vous nous confiez à propos de vos souvenirs.<br /> <br /> Koua ? Eve Lyne, l'aînée des cinq ?<br /> <br /> C'est comme moua, alors ?<br /> <br /> Ah les familles nombreuses, ce super nid douillet !<br /> <br /> Avec les histoires de chacun.<br /> <br /> Avec les amis de chacun.<br /> <br /> J'adore les souvenirs.<br /> <br /> Ils réchauffent mon coeur.<br /> <br /> J'aime refouler des lieux "sacrés".<br /> <br /> Bonne nuit à tous.
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D
Et oui c'était comme ça en ce temps là. On laissait les portes ouvertes. A mercredi.
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A
Ah Daniel, ton texte me fait penser à un film noir et blanc de Jean Renoir.<br /> <br /> Il y a tout, je vois la scène, quelle nostalgie !<br /> <br /> Quant à la musique (je ne connaissais pas Rina Ketty), je la passe en boucle en ce samedi soir et j'ai quinze ans.<br /> <br /> A lire les commentaire au-dessus, à y trouver José, je vois que là, tu as touché le cœur de tous, c'est un pur moment de bonheur.<br /> <br /> Je vois déjà PLV commenter avec son verbe...<br /> <br /> <br /> <br /> Ah le lait de la ferme, le vrai lait, celui chaud, sorti de la mère, avec lequel on baratte... je revois les berthes à lait à l'entrée de la ferme, au bord de la route, attendant le ramassage sans que jamais une seule incivilité ne puisse se produire ... je revois la France profonde, belle et paisible, dure au labeur et nous, le samedi soir, aller au bal, les filles en rang d'oignons assises sur les chaises sur un seul côté ... et moi, incapable d'inviter qui que ce soit... alors que l'accordéon régnait en maître au centre de la piste... mon Dieu quel bonheur !
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P
Bonsoir Daniel.<br /> <br /> Rina Ketty, diable ! Ce n'est pas d'hier et c'est déjà ancien pour moi, de 66 ans .<br /> <br /> Les lieux que l'on a connus, je préfère ne pas les revoir car ils ont changé et je ne retrouverais plus rien de ce qui a fait ma jeunesse: ils sont bien dans mes souvenirs !<br /> <br /> Bon dimanche.
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D
des bonheurs simples qui nourrissent l'enfance et dont on aime parler plus tard.
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C
Une douce nostalgie émane de vos lignes... Cette ferme vous a beaucoup marqué, même si l'endroit n'incitait guère aux rencontres entre copains. Mais la vie c'est aussi regarder ces gestes permettant de comprendre d'où vient le lait, d'où provient le beurre... Les fermes étaient les plus beaux lieux "d'apprentissage" pour tout cela ! J'aime beaucoup cette évocation du charme d'antan, même si le labeur était difficile. <br /> <br /> <br /> <br /> Quant à l'article de "Maylie", je l'avais vu et commenté. La musique que vous avez placée sur votre article est très agréable également. Mais je connaissais davantage " celle évoquée par "Maylie", pour l'avoir entendue souvent aussi.<br /> <br /> <br /> <br /> Merci, Daniel. Et bravo pour la photo retrouvée ! C'est assez incroyable !<br /> <br /> <br /> <br /> Bon week-end,<br /> <br /> Cathy.
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K
Ce qui me touche, entre autre, dans ton texte Daniel est ce que tu dis à propos de l'ennui. Moi je n'ai pas vécu ça. Toujours plein d'enfants tout autour durant mon enfance. Mais je pense aux enfants uniques, comme ma petite-fille, presque toujours en compagnie d'adultes. Elle aura 11 ans le mois prochain, mais on lui en donnerait 14, peut-être justement du fait d'être trop en compagnie d'adultes.<br /> <br /> J'aime tous les détails de ton histoire, et je vois à quel point les enfants sont dans le présent et n'ont d'intérêt que d'expérimenter la joie.
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J
Cher Daniel,<br /> <br /> J’apprécie votre “flash back” que nous aurions pu écrire ensemble. Question musique, nous avons été “élevés” au son des mêmes rengaines, qui ne quittent pas notre mémoire, mêlées à cet inimaginable bagage de souvenirs. Quand ils couvrent quasi 4 fois 20 ans, j’en arrive bien souvent à me poser la question « Où est sauvegardé ce bagage de souvenirs de toutes sortes ? ». Et j’en arrive toujours à la même conclusion (ou intuition ?) : notre mémoire est en dehors de notre corps physique et serait donc animique. Notre cerveau servirait de modem. J’attends toujours la preuve du contraire.<br /> <br /> <br /> <br /> Mais je suis surpris par la technique qu’utilisait votre grand-mère pour battre le LAIT et obtenir du BEURRE. Ma grand-mère était fermière et faisait son beurre au départ de la CRÈME du lait, après écrémage de celui-ci (le lait contient 3 à 4 % de crème, qui elle-même, produit 30 à 40 % de beurre, le solde est constitué de babeurre avec lequel on fait le fromage blanc. Reste de l’eau).<br /> <br /> <br /> <br /> Quel “brainstorming” !!!<br /> <br /> <br /> <br /> Bon week-end à vous et à nos ami(e)s.<br /> <br /> <br /> <br /> José
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J
Nos souvenirs font partie de nous. Ceux de notre enfance restent vivaces. Sûrement parce que ces moments ont été essentiels pour nous construire. Votre récit m'a rappelé certains éléments de ma propre enfance. Agréable d'y repenser sans oublier le présent si essentiel. Belle journée à vous.Ämitiés. Joëlle
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