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Les voies de l'âme
16 octobre 2012

Salle d'attente

 

Le val de graceLe Val de Grâce à Paris

 

Hier, le Val de Grâce, l’hôpital militaire parisien. J’accompagne une vieille amie qui  a beaucoup de mal à se déplacer. Elle a rendez vous au service de consultation cardio vasculaire afin de contrôler le fonctionnement de son pace maker. Nous entrons dans la salle d’attente en disant « Bonjour ». Avec un bel ensemble, tous les patients qui sont là répondent en cœur «Bonjour ». Nous nous asseyons. Un silence de plomb règne dans la salle d’attente. Tout le monde attend qu’on appelle son nom. Une femme arrive un peu pressée comme si elle était en retard. Elle s’assoit et s’éponge le front. Puis elle plie soigneusement sa veste pour la placer derrière son dos tout contre le dossier de la chaise. Sans doute un quelconque mal au dos. Elle reprend sa respiration et met ses deux mains devant le visage en signe de désespoir.

Face à moi, un vieux monsieur très distingué  dans son costume gris, accompagné d’un ami, attend ses résultat d’examen Il a une belle chevelure blanche (on dirait qu’il s’est coiffé avant d’entrer dans la salle d’attente). A ma gauche, une femme habillée tout en blanc avec un sac à main en laine blanche, les cheveux long, maquillée, se tient toute droite sur sa chaise. Elle ouvre le dossier qui est sur ses genoux, prend son stylo et se met à écrire une lettre. Je la regarde et la soupçonne d’avoir une personnalité rigide (ce n’est pas bien de ma part de juger comme cela les gens). Un docteur entre avec un dossier à la main et le remet au vieux monsieur. Ce sont ses résultats d’examen. Le vieux monsieur ouvre le dossier avec anxiété, lit attentivement. Son visage se détend. Il parle à voix basse avec son ami. Ils se lèvent et s’en vont.

Un homme rentre, la cinquantaine, en simple tee short qui fait ressortir ses muscles saillants. Sur les bras, des gros tatouages. Il s’assoit, droit comme un i et attend les bras croisés sur sa poitrine musclée. On le sent décidé, mais décidé de quoi ?

Les patients quittent la salle un par un, appelés par leur médecin. Je me retrouve seul. Je sors dans le couloir faire quelques pas. Mon regard se pose sur une pancarte » les fleurs coupées et les fleurs en pot sont interdites lors des visites ». Des portes s’ouvrent des hommes et des femmes en blouse blanche apparaissent et disparaissent un dossier à la main, le regard sévère. Ballet mystérieux des infirmières et des médecins.

Monde secret et tout puissant du corps médical face à la population des patients anxieux ou résignés.

Daniel

Commentaires
A
Quoi de plus passionnant que d'observer ses congénères !<br /> <br /> Les salles d'attente sont propices à ces rencontres d'un regard, d'une gestuelle, d'une pensée furtive. Les émotions, la fièvre, la douleur, l'angoisse, le bavardage, les sourires, la sévérité, tout y passe.<br /> <br /> Observer c'est être attentif, c'est aimer, c'est donner.<br /> <br /> Difficile de ne pas avoir de préjugés dans l'observation et quoi de plus naturel puisque l'on vit dans un monde de dualité.<br /> <br /> Observer, c'est quelque part chercher dans l'autre une intimité, une identité, c'est un peu juger sans le vouloir.<br /> <br /> Mais comment faire dans une petite pièce où nous sommes assis les uns près des autres, à moins de lire ou de fermer les yeux ?
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E
Tous vos témoignages me ramène quelques mois en arrière...<br /> <br /> Depuis une année, un ami cher à mon coeur luttait contre un cancer des os.<br /> <br /> Nous étions si souvent en lien téléphonique, je pensais qu'il n'y avait pas lieu que je me rende à l'hopital, près de Paris.<br /> <br /> Puis, un matin, comme une impulsion, je décidais de monter...<br /> <br /> Les mains dans les poches, pour un aller retour vite fait en TGV.<br /> <br /> J'angoissais à l'idée de ce qui m'attendait.<br /> <br /> Non non...Je n'ai pas trouvé un moribond, mais un gaillard qui m'attendait de pieds fermes, à peine marqué par la souffrance ...(enfin en apparence).<br /> <br /> Les heures ont passé tel un mirage...<br /> <br /> On aurait dit que même les soignants étaient de connivence pour nous laisser tranquilles, lui et moi.<br /> <br /> Je voulais qu'il se repose, mais il n'était pas fatigué ce jour là...<br /> <br /> Il voulait que je lui trouve des chants de religieuses dans des églises particulières.<br /> <br /> Je le connaissais bien et, je savais que dans cette vie présentement, c'était vraiment pas sa tasse de thé, ni sa priorité.<br /> <br /> J'ai vite compris qu'il souhaitait du grégorien...Va t'on savoir ???<br /> <br /> Puis, j'avais mon train à prendre...<br /> <br /> Le grand gaillard de 57 ans, dans son pyjama m'a raccompagnée presque jusqu'au dehors dans un signe de la main, nous nous sommes dit: "Salut ! A bientôt !"<br /> <br /> Je me suis demandée lequel des deux était le plus vivant, ou le plus mort...<br /> <br /> Sensation étrange.<br /> <br /> Au retour, dans le train, j'ai observé un magnifique arc en ciel.<br /> <br /> Quelques jours plus tard, mon ami est partit.<br /> <br /> "Peu importe où j'irai après<br /> <br /> ma mort, car ,<br /> <br /> des deux côtés,<br /> <br /> j'ai des amis qui m'attendent."<br /> <br /> Voilà qui lui ressemble bien.<br /> <br /> <br /> <br /> Pour le 16 novembre à Paris, j'espère que vous serez nombreux avec notre Alain et que vous passerez un bon moment ensemble.<br /> <br /> Par la pensée, n'en doutez pas, je serai présente au milieu de vous !
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D
Moi aussi j'aime bien observer les gens dans la salle d'attente. Je m'imagine leur vie, je me demande ce qu'il pense, je m'interroge sur leur maladie. <br /> <br /> C'est pourquoi j'aime bien aussi m'installer à la terrasse d'un café afin de regarder les passants. Je ne me lasse jamais....
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D
Indicateur, certes non. Observateur...Oui.<br /> <br /> <br /> <br /> Peux tu te libérer le 16 novembre après -midi. Alain sera à Paris. Nous avons convenu de nous voir avec Francine. Ce serait bien sympathique de passer un moment ensemble
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D
Votre témoignage est bien émouvant. La maladie est une épreuve souvent bien douloureuse mais qui fait aussi grandir
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D
L'inspiration est quelque chose de mystérieux. Inutile de forcer, cela doit jaillir spontanément. J'attends, pour un jour indéterminé, une photo de vos peintures pour les mettre dans la galerie du blog........Continuez à écrire, à peindre, il n'y a rien de plus merveilleux que de créer
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F
Que ce soit comme patient ou comme accompagnant, je ne peux compter le nombre de périodes passées en salle d'attente d'hôpital. La souffrance pour soi ou pour l'autre, ou l'espoir et le bonheur pour une naissance annoncée, nous fait souhaiter initialement que le temps passe vite. Mais paradoxalement parce que l'attente est très longue, au bout d'un moment nous avons l'impression d'être hors du temps, et c'est pur cela que nous y vivons un instant présent intense où les qualités d'observation sont exacerbées, souvent indépendante de jugement. Ainsi nous en gardons un souvenir vivace même des années après.
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C
Bonjour Daniel,<br /> <br /> <br /> <br /> Très juste vision de ces salles d'attente dans lesquelles nous pouvons passer de nombreuses heures parfois !<br /> <br /> <br /> <br /> Lorsqu'il m'arrive de m'y trouver, j'observe beaucoup l'attitude de chacun (discrètement bien entendu)... <br /> <br /> <br /> <br /> Par le biais de cet écrit, c'est "comme si j'y étais"... <br /> <br /> <br /> <br /> Bonne journée,<br /> <br /> <br /> <br /> Cathy.
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P
Intéressante ton analyse Daniel !<br /> <br /> En te lisant, je croyais me reconnaître ...<br /> <br /> Mais jamais je ne me serais si bien souvenu de tous les détails.<br /> <br /> A moins de les noter au fur et à mesure sur mon petit calepin.<br /> <br /> Et jamais je n'aurais su retranscrire aussi bien les faits.<br /> <br /> Tu ferais un excellent indicateur de police !<br /> <br /> Hé hé hé ...
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J
Un jour ou l’autre, un peu plus tôt, un peu plus tard, nous vivons tous cet instant de la vie, que nous décrit avec une vérité, un talent et une sensibilité indéniables notre ami Daniel, qui nous plonge dans une “ambiance” qui n’a rien à voir avec celle d’un quai de gare ou de métro. Les humeurs, les regards n’ont rien de commun.<br /> <br /> <br /> <br /> Pour certains, cette démarche ne survient qu’une seule fois. En ce qui me concerne, je ne compte plus ces visites “hospitalières” que ce soit pour moi-même ou pour y accompagner un parent ou un ami, comme Daniel vient de nous le dire.<br /> <br /> <br /> <br /> Et puis, il y a la présence, le réconfort que l’on apporte aux plus malchanceux : les hospitalisés. <br /> <br /> <br /> <br /> Au fil du temps, une certaine routine s’installe, le malaise, l’angoisse même qu’engendre la fréquentation de ces lieux fait place à un certain “détachement” du mauvais sort, de la souffrance, mais de l’inéluctable aussi. Notre angoisse égoïste est vite étouffée par notre compassion pour l'autre.<br /> <br /> <br /> <br /> Le plus émouvant reste tout de même l’accompagnement d’un mourant, d’une mourante. La première fois, l’appréhension est à son comble. Mais, bien vite, ce qui apparaissait comme une épreuve se mue en privilège. Maguy Lebrun a écrit dans ses livres que “lorsqu’on accompagne un mourant dans ses derniers instants de vie terrestre, un moment survient où on ne sait plus lequel des deux accompagne l’autre”. Je vous assure que c’est absolument vrai. J’ai vécu ce privilège à plusieurs reprises. <br /> <br /> <br /> <br /> Et ne croyez pas que lorsque les médicaux disent “heure du décès : dix heures huit” aucune émotion ne les étreint : j’ai vu pleurer des infirmières à très chaudes larmes... Pire encore : au CHU de Liège, plusieurs infirmières se sont suicidées au sein même de l'hôpital, en se jetant dans le vide.<br /> <br /> <br /> <br /> José
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